Ken Liu est devenu en quelques années un auteur de SF incontournable. “Toutes les saveurs” est une novella qu’on devine importante pour l’écrivain, tant celle-ci rend hommage à la culture Han et à la mentalité chinoise. Ken Liu ayant quitté enfant la Chine pour les États-Unis, c’est un retour aux sources dénué de fantastique mais passionnant pour autant.
Lily épie avec curiosité les locataires chinois de son père, propriétaire d’un magasin à Idaho City. Alors que la ruée vers l’or bat son plein dans l’Ouest, la main d’oeuvre chinoise se fait nombreuse. Choc des cultures, racisme mais aussi intégration sont au coeur des problématiques sociales de ses immigrées venus de l’autre rive du Pacifique.
Ken Liu s’empare d’un moment charnière de l’Ouest américain en abordant le sujet de la première vague d’émigration chinoise vers les États-Unis. Partis pour des raisons économiques, ils forment une communauté soudée par la langue, la cuisine et les histoires populaires. Pour avoir vécu en Chine, je peux témoigner que ce socle culturel commun est très fort. Et il vaut mieux, car l’atmosphère leur est hostile : les blancs exploitent les nouveaux arrivants et la population asiatique est largement ostracisée.
Pourtant, et à ce titre l’épilogue est des plus intéressants, cette population venue de Chine va profondément marquer l’histoire de l’Ouest américain, en représentation une part non négligeable de la population à une certaine époque. Encore aujourd’hui le Nouvel An chinois est largement fêté dans ces États (dont l’Idaho) et ce bien au-delà de la seule diaspora.
Ce sont les grands absents des westerns de cinéma et de l’imaginaire associée à la conquête de l’Ouest en général. Si les État Unis étaient vues comme une terre d’opportunités, la réalité était souvent bien plus difficile. “Toutes les saveurs” pose la question de l’assimilation, montre qu’elle n’est pas toujours nécessaire à l’intégration et qu’en général, c’est la volonté de vivre ensemble qui permet de faire société.
Edité en VF au sein de la collection Une Heure Lumière des éditions du Bélial.
