La “Chronique des Rivages de l’Ouest” est la seconde série de fantasy d’Ursula K le Guin. Écrite au début des années 2000 et restée dans l’ombre du cultissime cycle de “Terremer”, cette trilogie constitue en quelque sorte le bijou caché de sa bibliographie. Dans ce second tome, intitulé “Voix”, l’autrice américaine continue sa démonstration de grande créatrice d’univers fictifs.

La ville portuaire d’Ansul vit sous le joug oppressant des Alds, venus du désert dans une croisade religieuse et militaire. Alors que la ville était célèbre pour sa culture, son université et le talent de ses artistes, les livres y sont désormais interdits. Némar vit dans la maison de l’oracle d’Ansul et son destin va basculer lorsqu’Orrec le conteur et Gry sa compagne se présente à ses portes.

“Voix” ne dégage pas du tout la même impression que “Dons”, le premier tome de la trilogie. Ce dernier baignait dans une ambiance mélancolique, bucolique et reculée qui servait son propos intimiste. Ici, il est question de fanatisme religieux, de l’importance de la culture, du savoir et de la connaissance qu’Ursula K le Guin oppose à l’obscurantisme. La capacité intellectuelle de raisonner est seule capable de faire des gens des citoyens libres et de faire société.

Loin d’être un prêche pour une laïcité forte, “Voix” est plutôt une incitation à la tolérance religieuse, à la tentative de compréhension mutuelle et du respect des croyances d’autrui. La figure du héros, personnifiée ici avec Orrec qui a fait un bout de chemin depuis le premier tome, est ni un vaillant guerrier ni un mage puissant : son pouvoir est celui des mots.

“Dons” questionnait la liberté individuelle de décider de son destin. “Voix” interroge la liberté d’un peuple à l’autodétermination et à la défense de ses traditions. À ce titre, on peut dresser plusieurs parallèle avec “L’oeil du Héron”, aux thématiques proches bien que ce dernier soit de la science-fiction. Voici en tout cas une fantasy engagée et intelligente qui profite des talents de conteuse d’Ursula K le Guin. “Soyez libres !”

Réédité dans de très belles éditions brochées aux éditions L’Atalante.


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