Peu de bandes dessinées ont autant fait le buzz depuis le début de l’année. Manu Larcenet, auteur formidable et artiste complet du médium s’il en est, a même été invité dans les émissions littéraires de grandes chaînes de télévision nationales pour parler de son dernier chef d’oeuvre : “La route”, une adaptation du roman post apocalyptique de Cormac McCarthy.
La route, c’est l’histoire de ce père et de son fils qui tentent de survivre dans un monde qui s’est effondré. Ils tentent de rejoindre la mer, en échappant aux multiples dangers et aux hommes devenus cannibales. Une histoire très sombre, à l’ambiance pesante, peu bavarde, qui vaut plus pour l’atmosphère étouffante qu’elle dégage plus que pour son scénario.
Et c’est là qu’entre en jeu l’adaptation en bande dessinée. Car ce qui est véhiculé par les mots du roman est converti chez le lecteur en images mentales. Et c’est particulièrement vrai avec la plume de McCarthy, imagée et puissante. Rendre une telle émotion avec des cases et un dessin figuratif était un exercice difficile. Mais Manu Larcenet a totalement réussi l’exercice.
Chaque case peut se voir comme un tableau, emplie de détails, forte d’une impression de matière palpable. Les deux personnages principaux échangent peu, et quand ils le font, ce sont des dialogues tirés directement du roman. En respectant le matériel de base et en proposant une vision personnelle tout en étant respectueuse, l’auteur de BD livre un bijou graphique. Certaines scènes sont difficiles, la vision des corps est parfois éprouvante, mais l’auteur ne se dérobe pas et ne tombe pas dans un macabre gratuit.
“La route” mérite le tapage critique et médiatique qui a accompagné sa sortie. C’est une bande dessinée à lire d’une traite, seul, en totale introspection, comme si on regardait un film. Et une fois la séance terminée et les lumières rallumées, n’hésitez pas à lire le roman. Car c’est une expérience de lecture coup de poing dans un genre qui a depuis proposé de nombreuses histoires, mais peu d’aussi marquantes.
Édité chez Dargaud.
