Quel beau voyage que “Un étranger en Olondre”, ce magnifique roman de Sofia Samatar, lauréat des World et British Fantasy Awards ! Lorsqu’on me questionnera à l’avenir sur mon attirance pour la fantasy, je parlerai de ce récit qui prouve mieux que bien d’autres la puissance de l’imaginaire.
Jevick est le fils d’un marchand de poivre. Il grandit avec les récits de voyage de son père, qui va chaque année commercer avec l’Olondre, et avec les livres de son maître, venu du lointain pays. Quand à son tour vient le temps du voyage, son aventure à lui sera bien différente, surtout après avoir croisé une jeune femme mourrante..
La plume pleine de poésie de Sofia Samatar m’a tout de suite fait pensé à celle d’Ursula le Guin. Les similitudes ne s’arrêtent pas là. L’autrice d’origine somalienne nous immerge dans son monde qui rappelle l’océan Indien et l’Afrique, entrecoupe son récit de chansons, de poèmes, de récits et de légendes des peuples qui prennent vie au fil des pages. Le roman en devient avant tout un formidable voyage, dépeint avec une grande richesse de mots et d’images. Ce monde passionnant à découvrir au fil des aventures puis mésaventures du personnage principal, il devient en quelque sorte l’élément central d’un récit qui prend son temps et soigne son cadre plus encore que son intrigue.
Vous ne trouverez pas ici de combats épiques ni de quêtes pour sauver le monde, mais un récit à hauteur d’homme, qui creuse ses personnages et leur donne un passé, des rêves et donc une véritable consistance. C’est également un formidable hommage au pouvoir des mots et à la force de la littérature. L’Olondre est le pays de la prose couchée sur le papier, des romanciers, des poètes et des philosophes. Quel pays prolixe que celui-là !
“Un étranger en Olondre” fait partie de ces récits précieux et sensibles qui s’érigent loin au-dessus de la production effrénée d’œuvres de fiction. Par sa plume virevoltante traduite d’une main de maître par Patrick Dechesne, par son cadre dépaysant nourri de multiples influences et ses personnages d’une grande humanité, il s’impose comme un évident coup de cœur.
Edité en VF aux éditions Argyll
